« C’est bon, je le ferai demain… »
Moment que l’on connaît tous… Et tendance incontournable de nos vies qui nous pousse à remettre des choses au lendemain : la procrastination. Zoom sur ce phénomène et quelques astuces pour en venir à bout.
« Je le ferai demain », « j’ai pas le temps », « je suis fatigué »…
Ces phrases vous parlent ? C’est normal : vous avez forcément déjà expérimenté le fameux phénomène de la procrastination.
Mais pas de jugement ici : nous sommes tous et toutes sujets à la procrastination.
Demandez autour de vous… Sans surprise, vous trouverez forcément tout un tas de gens qui le pratiquent de façon plus ou moins intense.
Et ça n’épargne pas non plus les personnes les plus célèbres :
- Margaret Atwood, auteure emblématique du roman « The Handmaid’s Tale », se décrit comme une « procrastinatrice de classe mondiale », attendant que le stress monte durant l’après-midi pour se mettre à écrire.
- Léonard de Vinci, auteur du célèbre tableau de La Joconde, est aussi connu pour bon nombre d’œuvres inachevées.
- Victor Hugo attendait toujours la dernière minute pour se motiver, écrivant souvent la nuit pour rattraper son retard et rester dans les temps.
Tout le monde procrastine et c’est ok.
La procrastination n’est pas une maladie (bonne nouvelle !) ; le tout est de savoir l’identifier correctement et la gérer. Parfois, elle est nécessaire et nous envoie le signal que nous avons besoin de nous reposer. Alors, elle est positive et il faut l’écouter (et donc s’écouter soi-même). Et parfois, elle nous empêche d’avancer et d’être satisfait de notre journée et de nous-mêmes. Elle est alors négative. C’est sur cette forme-là précisément de procrastination que nous voulons agir.
Mais avant de nous lancer dans les astuces et les stratégies à mettre en place, je pense qu’il est important de bien comprendre ce qu’est la procrastination et, surtout, pourquoi il nous arrive de procrastiner.
Je pense qu’il est essentiel de comprendre les vraies raisons de notre procrastination. Et je dis bien les vraies raisons parce qu’on identifie pas, peu ou mal pourquoi on décide de remettre au lendemain.
Et si on ne comprend pas pourquoi on procrastine, on risque de mettre en place des choses qui ne sont finalement pas adaptées. C’est exactement le même principe que de comprendre l’origine de nos symptômes, à savoir la maladie exacte, pour prendre le traitement adéquat qui agira précisément sur cette maladie (et non sur ce qu’on pense être cette maladie).
La procrastination, on parle de quoi exactement ?
La procrastination, c’est une tendance qui nous pousse systématiquement à retarder la réalisation d’actions et de tâches, peu importe le domaine de vie (vie quotidienne, boulot, loisirs…) et tout en ayant conscience des potentielles conséquences négatives.
Et en fait, il s’agit là d’un comportement typiquement humain généré par différents facteurs.
Les vraies raisons de notre procrastination
Souvent, on pense qu’on procrastine parce qu’on est peu ou mal organisé, ou parce qu’on a la flemme, qu’on est paresseux ou peu motivé. Mais en réalité, les raisons sont souvent plus complexes et plus profondes.
Alors oui, ça peut arriver qu’on procrastine par fainéantise et par flemme mais le plus souvent, d’autres origines l’expliquent.
Nous sommes programmés pour procrastiner
Comme je le disais, c’est un comportement inhérent à notre condition humaine car nous sommes en fait programmés pour chercher du plaisir immédiat. Neurologiquement parlant, notre cerveau est conçu pour nous pousser à nous satisfaire de la façon la plus rapide possible. Et une tâche plus ou moins difficile demandant plus de temps ou d’investissement ne répond pas à ce besoin immédiat, même si la satisfaction qu’on ressentira une fois la tâche accomplie sera plus grande.
Le mot d’ordre ici concerne l’immédiateté de notre plaisir. C’est neurologique.
Mais nous ne sommes pas tous égaux devant cette recherche de satisfaction immédiate : certains sont mieux armés que d’autres pour résister à la tentation.
Nos émotions comme moteur de la procrastination
La procrastination est le résultat de notre incapacité à gérer nos émotions provoquées par les choix qui s’offrent à nous :
- Réaliser la tâche contraignante qui nous apporte une récompense « a priori » faible et non immédiate
- Réaliser une tâche facile qui nous apporte une récompense immédiate et « a priori » plus importante
Vous avez déjà remarqué ?
Quand vous êtes en procrastination consciente, c’est-à-dire que vous avez conscience que vous procrastinez « volontairement », vous savez que réaliser cette présentation de 20 slides pour le boulot vous permettra de gagner du temps en fin de semaine et d’avancer. Mais le rangement de la vaisselle ne va pas se faire tout seul et, c’est vrai que ça fait déjà 2 jours que ça traîne sur le comptoir…
Vous voyez où je veux en venir ?
Une petite récompense pour une tâche express et facile, plutôt que de réaliser la tâche complexe et plus longue qui nous offrira beaucoup plus de confort (et de satisfaction) le reste de la semaine. On le sait, l’intention est là mais on n’a pas assez de contrôle, c’est plus fort que nous : ranger la vaisselle est plus attirant parce plus facile et plus rapide.
Nous ne sommes pas tous égaux
Nos pathologies et caractéristiques émotionnelles et psychologiques peuvent aussi fortement influencer notre tendance plus ou moins grande à procrastiner.
De manière non exhaustive, la peur de l’échec, une faible estime de soi, l’ennui chronique ou le besoin de perfection peuvent être des facteurs favorisant la procrastination.
Le perfectionnisme est un bon exemple de déni : on se convainc qu’on ne se lance pas tant qu’on n’est pas parfaitement prêt. Mais au fond, on n’est jamais « parfaitement prêt ». Parce que rien n’est jamais parfait.
By the way, mieux vaut fait que parfait !
Il existerait aussi des facteurs environnementaux et sociaux qui favorisent notre tendance à la procrastination.
Durant l’enfance, certains discours (« tu n’y arriveras pas », « on a le temps, c’est bon », « fais-toi plaisir d’abord ») peuvent rester ancrés et créer des biais cognitifs et des croyances erronées.
Ou encore, le nombre de distractions actuellement à notre portée (internet, les réseaux sociaux, les jeux vidéos et la société de consommation en général) multiplient les tentations et les opportunités d’assouvir notre injonction de plaisir immédiat.
Mais la procrastination n’est pas une fatalité. La procrastination, c’est en quelque sorte une décision, plus ou moins consciente, que nous prenons de remettre à plus tard une tâche ou une action, en dépit des conséquences potentiellement négatives dont nous avons connaissance.
Et parce que c’est une forme de décision, nous pouvons donc agir dessus.
5 astuces pour en finir avec la procrastination
À nouveau, la procrastination n’est pas toujours négative et ne nécessite donc pas toujours qu’on doive « en finir avec elle ». Si vous êtes dans une période intense parce que… vous avez beaucoup de boulot, vous avez des enfants, vous lancez un nouveau projet, vous gérez beaucoup (trop?) de choses… Il est évident que vous avez besoin d’une pause. Et le fait d’avoir besoin de souffler réellement, de prendre du temps pour soi, se retrouver et se ressourcer, ne constitue pas une forme de procrastination mais la réponse à un besoin fondamental de votre corps de souffler et récupérer.
Là où la procrastination n’est plus positive, c’est quand vous pouvez observer que les conclusions que vous formulez servent à procrastiner.
Je ne fais pas ça parce que je n’ai pas le temps, parce que je suis fatigué, parce que je n’y arriverai pas.
Posez-vous les bonnes questions :
- Si vous n’avez pas le temps de tout faire, peut-être que vous pouvez commencer ?
- Si vous êtes systématiquement fatigué avant de commencer, peut-être que c’est une tâche à planifier le matin ?
- Si vous pensez ne pas être à la hauteur, de quoi avez-vous besoin pour y arriver ?
Astuce #1 : Restez bienveillant
Ce n’est pas parce que vous observez que vous êtes sur le point de procrastiner, que vous devez vous juger. Au contraire !
Vous avez mis le doigt dessus : vous avez remarqué quelque chose qui se veut souvent automatique et spontané. Soyez heureux et reconnaissant de vous être observé justement.
Maintenant, pour optimiser vos chances de vous y mettre, soyez bienveillant, adoptez un discours positif. Les discours tels que « bouge-toi les fesses » et « t’es vraiment une feignasse » n’ont jamais tiré les gens vers le haut, de façon positive et à long terme. Encouragez-vous plutôt à démarrer votre tâche ou motivez-vous en vous lançant un défi « Je peux le faire en 15min ! ».
Vous verrez, ça peut déjà faire toute la différence.
Astuce #2 : C’est ok d’être dans l’inconfort
C’est vraiment une croyance, une déformation de notre époque de penser que tout ce qu’on doit faire doit être confortable, parfait.
Je ne sais pas pour vous mais j’ai vécu une période compliquée qui m’a fait réaliser que j’avais des « traumatismes », plus ou moins anciens, à soigner et que toute ma vie et mes comportements s’étaient construits sur base de ces traumas. J’ai (ré)appris à m’écouter, à ressentir, à laisser la place à mon intuition, et ça me fait beaucoup de bien depuis un an. Mais tout n’est pas rose pour autant.
Je trouve qu’on vit un peu une époque du « Me sentir libre et bien dans ma peau, partout, tout le temps » et (ne me faites pas dire ce que je ne dis pas) c’est très bien. Je pense même que c’est nécessaire et fondamentalement bon pour nous. Mais l’un des biais de cette pensée, c’est que ça peut parfois donner l’illusion qu’on doit en permanence être bien et heureux.
Or, on ne peut pas être heureux tout le temps. Et c’est ok en fait. Le savoir, s’en rendre compte, c’est aussi fondamental que nécessaire, je pense.
L’inconfort fait partie de la vie. C’est ce qui nous permet d’avancer, d’apprendre, de nous dépasser. Et ça nous donne un sentiment de satisfaction tellement grand une fois l’inconfort passé et l’équilibre retrouvé.
Astuce #3 : Décomposez l’éléphant
Parfois, si on ne se lance pas et qu’on procrastine, c’est aussi parce que la tâche nous paraît gigantesque et interminable.
La solution, c’est de décomposer la tâche principale en sous-tâches, en actions concrètes et plus petites. Ça permettra de dédramatiser et, en même temps, d’être plus proche d’assouvir votre besoin de satisfaction immédiate.
Vous avez une présentation de 20 slides à sortir ? Morcelez cette présentation et opérez chapitre par chapitre.
Vous lancez votre business ? Listez toutes les étapes et cochez votre to do au fur et à mesure.
C’est aussi simple que ça !
Et pour vous donner un coup de boost, définissez un timing court : lancez-vous pour 5, 10 ou 15min. Et souvent, vous constaterez que le fait d’avoir démarré, de vous être lancé vous donnera envie de poursuivre ; parce que ce n’est pas si complexe ou inconfortable, parce que vous avez bien avancé… Parce qu’en fait, le plus dur, c’est de s’y mettre.
Astuce #4 : Priorisez
Prioriser, c’est répondre à la question : « Qu’est-ce qui est important (pour moi) ? ».
Si on en revient à mon exemple plus haut : quelle est l’importance de cette grosse présentation vs l’importance de ranger la vaisselle ?
Si votre tête vous dit que la vaisselle est prio, soit vous vous mentez à vous-même, soit il est temps de se poser des questions sur votre boulot…
Prioriser ce qui est vraiment important pour vous, c’est une manière raisonnable et raisonnée de re-donner de la valeur à une tâche quand votre cerveau est en recherche de plaisir immédiat.
« Non, le linge n’est pas plié mais réaliser le logo de ma cliente me permettra de m’offrir ce city-trip à Madrid dont je rêve ! Alors que le linge… »
Je pense que vous avez saisi le principe.
Astuce #5 : Utilisez des outils
Télévision, réseaux sociaux, notifications, tâches de la vie quotidienne… Je l’expliquais plus haut : la multiplication des sources de distractions nuisent d’autant plus à notre volonté de « nous y mettre ».
Une façon d’optimiser nos chances de rester focus sur notre tâche, c’est d’éliminer, totalement mais plus souvent temporairement, ces distractions de notre champs de vision ou champs d’action.
Il en existe plein d’autres mais voici 3 applis qui vous aideront à rester concentré :
- Le mode Focus du téléphone : vous définissez une durée et votre téléphone bloquera toutes les notifications durant ce laps de temps.
- Onefocus : vous encodez un temps durant lequel vous souhaitez rester concentré et l’application vous bloquera l’accès à vos autres apps durant ce timing.
- Forest : vous lancez un chronomètre et cela plante un arbre dans votre jardin virtuel. Si vous vous arrêtez avant la fin du temps défini, ça… tue votre arbre. Radical mais très symbolique.
Perso, je suis devenue une adepte du mode Focus sur mon smartphone : je l’ai configuré avec un fond d’écran spécifique qui m’encourage à rester concentrée. Et ça marche !
Astuce bonus : Vous féliciter
Reconnaissez ce que vous avez accompli, que vous l’avez fait et soyez-en fier. Soyez content et manifestez-le. Tout comme vous vous êtes encouragé à faire cette tâche, clôturez-la en toute bienveillance.
Votre cerveau en a besoin et vous aussi.
La procrastination n’est donc ni une fatalité ou ni, seulement, une forme extrême de paresse. Le plus souvent, elle est la réponse la plus confortable face à une action inconfortable que nous devons réaliser. Et même si ce n’est pas toujours évident de la contrer en raison de notre nature humaine, de nos habitudes, de nos croyances, il existe des solutions.
Vous voilà maintenant mieux armé pour vous observer, identifier les pièges de la procrastination et les déjouer !